Zoom sur le Tabac des indiens, une plante majeure incontournable de la pharmacopée amérindienne. De nom botanique Lobelia inflata, les feuilles et les racines de cette petite plante de la famille des Campanulacées étaient utilisées en tant qu’herbe médicinale par de nombreuses tribus, telles que les Crows, Cherokees ou encore les Iroquois. L’un des usages le plus répandu consistait à la fumer pour soulager les troubles des voies respiratoires dans les rites de guérison : en particulier de la toux, de l’asthme et de la bronchite, d’où son appellation de “Tabac indien”. La plante était aussi utilisée pour soigner les torticolis, les morsures, ou encore contre les problèmes dermatologiques… sans oublier, bien sûr, la préparation d’infusion de la plante pour réaliser des “potions d’amour” ou encore en décoction pour contrer les troubles induits par la sorcellerie !
Mêlant l’usage des plantes au chamanisme et à la magie, les colons débarqués en Amérique furent effrayés par la médecine de ce qu’ils appelaient les « Peaux-rouges ». Ils l’estimaient diabolique, ou en tout cas primitive à leur yeux… cependant, inévitablement, certains colons, trappeurs, furent témoins et bénéficiaires directs des pratiques médicinales amérindiennes. Ils s’aperçurent que les Indiens possédaient des remèdes et des savoirs médicaux efficaces ! Dans cet article, nous verrons comment la Lobelia inflata cette plante d’apparence insignifiante est devenue l’une des références majeures de la médecine homéopathique !
De la médecine amérindienne à la médecine américaine !
Cette petite plante à connue une longue épopée depuis ses usages ancestraux, jusqu’à sa transformation en “médicament moderne”. Les historiens rapporte qu’au XIXème siècle, la Lobelia inflata était très largement utilisée par les médecins Américains en tant que vomitif afin d’éliminer les toxines. Ce serait Samuel Thomson (1769-1843), un herboriste et botaniste américain autodidacte qui aurait popularisé son utilisation en Amérique. La majorité de ses connaissances sur le sujet lui venait d’une vieille femme “guérisseuse”, c’est ainsi qu’il a découvert la Lobelia et les usages qu’en faisaient les autochtones. Il s’est d’ailleurs servi de cette plante et des connaissances des indiens d’Amérique dans le système de médecine alternative qu’il a fondé par la suite, appelée « thomsonisme ».
C’est une méthode à base de plantes, très spécifique et très originale pour l’époque. La théorie sous-jacente à sa pratique est très simple. Il pense que toute maladie, provient d’une perte de chaleur dans le corps humain. Et donc le but, c’est de ramener la chaleur avec certaines plantes et certaines mesures. Un autre objectif qu’il estime important, c’est d’éliminer les obstructions, les déchets, les accumulations en purgeant la personne. Chose qui peut paraitre un peu brutale aujourd’hui, mais n’oubliez pas qu’on est début 1800, et que l’alternative, ce sont des purges encore plus violentes, tels que les incisions et saignées. Au cœur de cette méthode, il y avait la Lobelia inflata pour faire vomir la personne et évacuer ce que Thomson appelait les blocages ou les déchets. Ensuite il utilisait d’autres plantes pour ramener de la chaleur interne dans le corps, et enfin il utilisait des bains de vapeur pour faire transpirer la personne (il avait découvert les vertus des tentes de sudation chez les Amérindiens et il s’en est très largement inspiré).
La méthode du Dr Thompson était reconnue efficace : en élevant la température du corps, en dilatant les vaisseaux sanguins et en renforçant le système immunitaire, cette cure accroissait la résistance aux infections et accélérait la cicatrisation. Ses méthodes connurent un grand succès à partir de la fin du XIXe siècle, succès qui ne furent bien sûr pas attribué à ses véritables inventeurs !
Les usages de Lobelia inflata dans la médecine actuelle
Les méthodes inspirées par Samuel Thomson se développèrent et perdurèrent jusqu’à ce que l’usage des plantes dans la médecine américaine déclinèrent après 1907, quand le gouvernement commença à subventionner les études médicales portant sur des médicaments chimiques qui prirent le dessus sur les produits naturels. Les laboratoires pharmaceutiques se servirent néanmoins des plantes utilisées par les Indiens pour y rechercher d’éventuelles molécules actives.
Le Tabac des indiens (Lobelia inflata), n’a pas échappé à cette tendance. Les études sur la plante ont confirmé beaucoup de ses qualités médicinales. Inscrite à la pharmacopée française depuis quelques années, la Lobelia inflata aurait notamment un effet intéressant sur le sevrage du tabac. La plante est ainsi utilisée sous forme de cigarettes pour s’en déshabituer. Il existe aussi des médicaments homéopathiques contre le servage du tabac, contre les nausées et les respirations difficiles.
A noter que nos articles sur l’histoire des plantes et leurs usages traditionnels ne doivent en aucun cas se substituer à la consultation d’un professionnel de la santé avant toute utilisation ! Sources : “A narrative of the life and medical discovery of Samuel Thomson” (1882), “Cherokee Plants and Their Uses, A 400 Year History” (1975) ; “Native Economic Plants of Montana” (1905) et “Iroquois Medical Botany” (1977).