La Mandragore est une plante herbacée vivace, originaire du pourtour méditerranéen, appartenant à la famille des Solanacées. Cette plante est entourée de nombreuses légendes, les anciens lui attribuant des vertus magiques extraordinaires. En effet, depuis l’antiquité, d’innombrables légendes se sont formées autours de cette plante rare et de ses pouvoirs magiques. La racine fut aussi bien portée comme talisman qu’ingérée en guise de philtre d’amour. Son usage est étroitement liée au culte des plantes, à la sorcellerie ainsi qu’à la magie noire.
Histoires, croyances et légendes de la mandragore, de l’antiquité au moyen âge !
En raison de la forme vaguement humaine de sa racine et de ses composés alcaloïdes, la mandragore a été associée depuis l’antiquité à des croyances et des rituels magiques. Elle est devenue au fil des années tellement mystérieuse dans le folklore, qu’elle a été par la suite considérée non seulement comme la plus puissante mais également comme la plus dangereuse de toutes les herbes magiques.
Les Perses et les Égyptiens de l’antiquité connaissaient déjà les propriétés médicinales de la mandragore. Des morceaux de racine de mandragore, ainsi que d’autres objets façonnés, ont été trouvés dans les chambres d’enterrement royales des pyramides. La mandragore est évoquée, parmi d’autres plantes médicinales, dans le célèbre Papyrus d’Ebbers datant de 1700-1600 avant JC. La mandragore est également évoquée dans l’ancien testament de la bible. On trouve dans les textes des considérations très déconcertantes pour nous aujourd’hui. Par exemple, Théophraste nous indique que lors de la cueillette il faut « tracer autour de la mandragore trois cercles avec une épée, couper en regardant vers le levant, danser autour de l’autre et dire le plus grand nombre possible de paroles grivoises ». Ainsi le cercle tracé autour de la plante crée un espace magiquement clos, enfermant la plante et permettant au magicien de s’en rendre maître ! Le rituel d’arrachage de la mandragore change dès le début du Moyen Âge. En effet, le collecteur de plantes doit maintenant pour dégager la racine, l’attacher à un chien et attirer l’animal au loin. Cette plante a une telle puissance magique que si l’herboriste s’aventurait à la déraciner lui-même, il s’exposerait à une mort certaine. Les textes ajoutent même que cette racine a en soi une telle puissance divine que, lorsqu’elle est extraite, au même moment, la plante émettait un cri d’agonie insoutenable tuant l’animal et l’homme non éloigné aux oreilles non bouchées de cire (Herbarius Apulei, 1481). En l’an 520, le manuscrit de Dioscoride de Vienne est illustré par deux miniatures sur lesquelles on voit une racine de mandragore attachée au cou d’un chien mort, gueule béante.
Les précautions lors de la cueillette sont aussi énoncées dans les écrits de Paracelse (1493-1541). Pour se procurer la racine de mandragore si dangereuse, il fallait des rituels magiques. Selon les divers écrits décrivant les rituels, on sait qu’ils se déroulaient les nuits de pleine lune. Les mandragores qui poussaient au pied des gibets étaient très prisées car on les disait fécondées par le sperme des pendus, leur apportant vitalité, mais celles des places de supplice ou de crémation faisaient aussi parfaitement l’affaire. La racine devenait magique après lavage, macération et maturation en linceul ; elle représentait l’ébauche de l’homme, « petit homme planté » ou homonculus. Ainsi choyée, la racine de mandragore procurait à son possesseur, prospérité prodigieuse, abondance de biens, et fécondité. Elle était vendue très cher en raison du risque à la cueillette.
“Les sorcières étaient-elles droguées” ?
On trouve aussi parfois la mandragore et la jusquiame dans la composition d’onguents utilisés par les sorcières. Une croyance très répandue aux XVIe et XVIIe siècles, voulait que les sorcières s’enduisent le corps d’un onguent avant de s’envoler dans les airs pour aller au sabbat. Elles s’y rendaient sur un balai ou une fourche, enduits eux aussi d’onguent.
Les accusations qui conduisaient les sorcières au bûcher comportaient deux composants : les maléfices et le pacte avec le Diable. L’action judiciaire s’ouvrait sur une plainte pour les maléfices répétées d’une jeteuse de sort qui était censée provoquer la mort de nouveau-nés, faire tomber la grêle sur les récoltes, etc. L’accusation d’assistance au sabbat n’apparaissait que plus tard, lorsque les juges ecclésiastiques s’emparaient du dossier. À l’époque, tout le monde croyait au Diable. Il ne faisait pas l’ombre d’un doute, qu’en concluant un pacte avec le Diable, la sorcière pouvait accomplir des maléfices redoutables et travailler à la ruine de l’Église et de l’État. Des dizaines de milliers de sorciers et sorcières furent ainsi envoyés au bûcher en toute bonne conscience des autorités. Seuls quelques scientifiques et médecins humanistes dénoncèrent ces persécutions et osèrent soutenir que le sabbat n’était qu’une illusion. Le problème de la réalité du sabbat fut d’ailleurs posé à peu près en ces termes par des scientifiques dès le XVIe siècle : « La description d’assemblées démoniaques et de leur prodiges a-t-elle une réalité objective ou est-elle le résultat de la consommation de drogues hallucinogènes ? ». Dès cette époque, un médecin et humaniste espagnol, Andrés Laguna, arrive à la conclusion que tout ce que croyaient faire les sorcières était le résultat de la prise de substances narcotiques, et donc que le sabbat était le seul produit de leur imagination.
Actuellement, les nombreuses études historiques quant aux aveux des sorcières ne permettent toutefois pas de conclure que les sorcières étaient des droguées. Si le témoignage de quelques sorcières utilisant des drogues hallucinogènes existe, le phénomène n’était pas généralisé et ne peut constituer une explication générale.
Attention, toutes les informations en rapport avec l’usage traditionnel, la médecine et les vertus des plantes n’est qu’informatif. La mandragore est une plante toxique ! Son usage n’est en aucun cas recommandé.
Sources, pour en savoir plus : -Christian Ratsch, Les plantes de l’amour, Les aphrodisiaques et leurs usages de l’antiquité à nos jours, éditions du Lezard, 2000. -Edouard Brasey, L’Encyclopédie du légendaire : trésors, artefacts et armes magiques, éditions le Pré aux clercs, 2008.